Introduction
Les directives européennes “Habitats” et “Oiseaux“, coordonnent les efforts de conservation de plus de 2 000 espèces et habitats dans les États membres de l’Union, dans le but de les maintenir ou de les rétablir dans un état de conservation favorable. La directive “Oiseaux” a été adoptée à l’unanimité des États membres dès 1979, avant d’être modifiée en 2009 pour devenir la directive 2009/147/CE. Treize ans après la première directive “Oiseaux”, la directive “Habitats” 92/43/CEE de 1992, a étendu le champ de la protection européen en assurant la conservation de plus de 200 types d’habitats rares et caractéristiques.
Dans un rapport publié en octobre 2020, l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) présente une synthèse des documents produits par les États membres concernant leurs applications de ces deux directives durant la période 2013-2018. Intitulé “État de la nature dans l’UE”, ce rapport dresse un panorama des réussites et des lacunes en matière de conservation de la nature. Il passe en revue les principales pressions et menaces dans ce domaine, l’état de de conservation des habitats et des espèces ciblés, ainsi que les mesures de restauration nécessaires pour l’améliorer. Ce rapport donne également un aperçu actualisé du réseau Natura 2000 et en particulier sa contribution aux améliorations attendues sur certains des objectifs qui étaient fixés à la stratégie européenne en faveur de la biodiversité à l’horizon 2020. Un résumé illustré comportant quelques courtes assertions figure dans ce document (figure 1).
Et les EEE dans cette évaluation ?
La lecture que nous avons faite de ce rapport a été évidemment spécifiquement tournée vers les indications concernant les EEE, pour tenter d’en évaluer à la fois la perception et l’importance présentées par l’Agence européenne pour l’environnement dans leurs relations et impacts identifiés avec les espèces indigènes et les habitats naturels.
Pressions et menaces
Les EEE sont citées à partir du troisième chapitre, dans la liste des pressions, telles que les modifications hydrologiques, les altérations physiques des milieux aquatiques, la pollution ou le changement climatique. Elles ne sont pas présentées dans le texte lui-même mais dans trois encadrés, ciblant des exemples concrets de mesures de conservation.
Le premier de ces exemples concerne des projets de rétablissement d’une dynamique naturelle d’évolution de dunes mobiles, habitat 2120 assez rare à l’échelle européenne le long des côtes atlantiques. Les dunes offrent un tampon naturel contre certains effets négatifs du changement climatique (par ex. l’élévation du niveau des océans), mais ce service écosystémique reste très dépendant des processus naturels comme l’érosion éolienne. Hormis leur fixation par des aménagements de digues solides (enrochements, etc.), l’une des principales menaces pesant sur cet habitat est la plantation ou la colonisation par des plantes, broussailles et arbres, souvent exotiques et envahissantes, qui entravent le processus naturel d’érosion et le déplacement de ces dunes. Plusieurs projets LIFE, notamment aux Pays-Bas, ont ainsi porté sur le rétablissement d’une dynamique naturelle de ces habitats côtiers.
Forêts de lauriers macaronésiens aux Açores (Box 3.5)
Le deuxième exemple concerne la protection d’un oiseau endémique et rare, le Bouvreuil des Açores (Pyrrhula murina) présent dans l’est de l’île de São Miguel. La survie de cet oiseau en danger d’extinction (100 couples en 2003) dépend de l’existence et de la qualité des forêts de lauriers macaronésiens (habitat 9360, “Macaronesian laurel forests“) dont les graines, les boutons floraux et les fruits charnus lui servent de nourriture.
Or, ces forêts de lauriers présentes dans les Açores et à Madère se retrouvent envahies par diverses plantes exotiques, qui en menacent la survie et donc celle de cette population d’oiseaux. Parmi ces plantes, figurent des espèces souvent introduites pour l’ornementation telles que Pittosporum undulatum, un arbre originaire du sud-est de l’Australie, Hedychium gardnerianum ou longose, Cryptomeria japonica, le Cèdre du Japon, ou encore Clethra arborea, un arbre endémique de Madère introduit aux Açores.
Trois projets LIFE consécutifs ont été mis en œuvre pour réguler ces invasions en éliminant les espèces envahissantes, dont les peuplements de Cryptomeria et de Hedychium, puis en replantant diverses espèces indigènes cultivées dans des pépinières locales (plus de 300 000 jeunes plants). Ces mesures semblent avoir été efficaces puisque durant cette période, l’état de conservation des forêts de lauriers macaronésiens s’est amélioré, passant de mauvais en 2012 à bon en 2018, et la population de Bouvreuil des Açores s’est nettement développée en augmentant même son territoire.
Activités agricoles dans les prairies finlandaises (Box 3.8)
Le troisième encart présente les prairies côtières boréales de la Baltique (habitat 1630) caractérisées par la présence de communautés végétales à faible croissance installées dans des zones soumises à des bouleversements de terrain. Elles se maintenaient depuis très longtemps grâce aux pratiques de la fauche et du pâturage qui empêchaient l’établissement de forêts mais en Finlande, l’abandon d’activités agricoles traditionnelles a mis en danger cet habitat, en favorisant le développement de roselières denses dans les eaux peu profondes. L’arrivée d’EEE est également citée parmi les autres pressions s’exerçant sur cet habitat.
Ces prairies côtières sont pourtant considérées comme très importantes pour les oiseaux nicheurs, dont le Bécasseau variable (Calidris alpina schinzii), le Fuligule milouin (Calidris pugnax) et la Barge à queue noire (Limosa limosa). Des programmes de restauration de ces prairies semi-naturelles ont donc débuté voici plus de deux décennies, par des actions de réduction de l’étendue des roselières, suivies par le rétablissement de mesures agricoles pour l’entretien de l’habitat. A partir de 2015, tous les sites étaient gérés dans le cadre de programmes agro-environnementaux de l’UE.
En Finlande, la superficie de ces prairies côtières gérées a augmenté de plusieurs centaines d’hectares depuis 2007 et ces efforts ont permis l’augmentation des populations d’oiseaux protégés. Pour maintenir cet habitat, l’éradication des espèces animales exotiques envahissantes, principalement le vison d’Amérique (Neovison vison) et le chien viverrin (Nyctereutes procyonoides), y est réalisée par des chasseurs locaux.
Pressions et réponses
Dans l’introduction du quatrième chapitre, il est rappelé que l’Europe est une des régions les plus densément peuplées du monde et que les activités humaines y ont entraîné le déclin et la détérioration d’un grand nombre d’espèces et d’habitats. Les directives européennes sur la nature exigent des États membres à la fois qu’ils établissent des bilans des situations, engagent des actions de conservation et en évaluent les améliorations. Ces actions de conservation sont principalement des mesures pratiques visant à atténuer l’impact des pressions passées et présentes sur les espèces et les habitats identifiés comme devant être protégés. Pour mémoire, le réseau Natura 2000 est la mesure globale à mettre en œuvre par les États membres et un cadre juridique d’application de ces actions, et le programme LIFE est le principal instrument de financement de l’UE pour leur mise en œuvre.
Le chapitre développe une vue d’ensemble des pressions et des menaces signalées par les États membres et de l’état de mise en œuvre des mesures de conservation. Selon le document, les États membres ont signalé plus de 67 000 pressions localisées, classées en 200 pressions différentes, réparties en 15 secteurs généraux, et plus de 6 000 mesures de conservation ciblées, classées dans plus de 100 types de mesures de conservation, elles-mêmes répertoriées dans des catégories correspondant aux grands types de pressions. La figure 2 présente un résumé très “grand public” des informations sur les pressions.
Pressions
L’analyse de cette masse d’information a permis d’établir un bilan des intensités des principales catégories de pressions sur différents types d’habitats et d’espèces (figure 3).
Les EEE y sont identifiées comme une de ces principales pressions, avec des intensités très variables, à l’instar de la plupart des autres pressions (sauf pour l’agriculture avec de fortes intensités dans presque tous les cas). Selon ce tableau, seuls les habitats de dunes et de broussailles sclérophylles (formations végétales de type maquis, garrigue) seraient toutefois exposés à des pressions notables des EEE. Seraient également soumis à des pressions évaluables les oiseaux en période de reproduction et, pour les groupes d’espèces “non-aviaires”, les plantes vasculaires et les amphibiens.
Ce chapitre propose un rappel sur ce que sont les EEE (définition, pressions très diverses sur la flore et la faune indigènes et montants très élevés des coûts de gestion). La partie du document qui leur est consacré (pages 78 -80) débute par un encadré sur le Puffin des Baléares (Puffinus mauretanicus), oiseau marin endémique se reproduisant en Espagne et dont toute la population est située dans le réseau Natura 2000.
Considéré comme étant en danger critique d’extinction depuis 2004, le Puffin des Baléares continue à être menacé par des dégradations de ses habitats, la pollution de l’eau et de l’air, des prises accidentelles (dues à la pêche et à la chasse), etc. L’espèce est également soumise à de de la prédation sur ses colonies de reproduction par des mammifères introduits (chats sauvages, genettes, rats).
Ses populations sont donc en déclin à court et moyen terme. Pour en améliorer la situation et le statut, des actions sont donc nécessaires pour réduire ces pressions, dont celles des EEE.
Des rappels sur le déploiement du règlement de l’UE 1143/2014 sur les EEE et l’identification des EEE préoccupantes pour l’Union préoccupante au sein de la liste sont suivis d’informations sur les éléments fournis par les États membres. Les espèces citées sont en lien avec les pressions sur les populations d’oiseaux, avec par exemple la prédation des poussins ou des œufs, en particulier par le Raton laveur (Procyon lotor) ou le Ragondin (Myocastor coypus), ou sur les habitats de sous-bois par abroutissement par le Muntjac de Reeves (Muntiacus reevesi), etc.
Selon les rapports fournis par les États membres, les EEE préoccupantes pour l’Union représentent environ 20 % de la pression globale rapportée pour les EEE, tandis que l’impact cumulé des autres espèces dépasse 50 % (figure 4). Il peut s’agir par exemple du déclin de la qualité de la végétation indigène en raison de la propagation d’EEE dans les habitats alluviaux et humides de plaine (par exemple, la Renouée du Japon, Reynoutria japonica, ou la Balsamine de l’Himalaya, Impatiens glandulifera). Le Vison d’Amérique (Neovison vison) est un exemple également cité à cause de ses impacts sur les oiseaux (populations de Foulque, Fulica atra, de la poule d’eau, Gallinula chloropus, ou d’autres Rallidés) mais aussi des d’amphibiens, reptiles et petits mammifères. Les EEE préoccupantes pour l’Union sont le plus souvent signalées comme des pressions sur les habitats côtiers, suivies par les forêts et les habitats d’eau douce.
A propos des habitats sclérophylles déjà cités, une des espèces exotiques présentée comme pression est le Faux indigo (Amorpha fruticosa), arbuste à feuilles caduques et à croissance rapide pouvant former des fourrés denses.
En général, les amphibiens, poissons, plantes vasculaires et oiseaux, et en particulier les oiseaux de mer reproducteurs tels que les puffins ou les pétrels tempêtes, sont les groupes d’espèces subissant les pressions les plus importantes des EEE. Par rapport à la dernière période de référence (2007-2012), les impacts des EEE ont gagné en importance tant pour les habitats que les espèces, amenant à les considérer comme une menace croissante à l’avenir. Elles affectent les habitats plus que les espèces. Les principales pressions concernant tous les habitats des zones humides sont l’agriculture et les modifications des régimes hydriques mais les EEE sont cependant indiquées comme la plus importante pression sur les forêts humides.
Bien que le changement climatique ne soit pas signalé dans le document comme une pression particulièrement importante pour la période 2013-2018, il est tout de même indiqué qu’il aura dans le futur un effet dramatique sur les plantes et les animaux européens (“a dramatic effect on European plants and animals“), entrainant une accélération de la perte de biodiversité dans de nombreuses régions. Il devrait exacerber le problème des EEE en Europe, en particulier dans les régions septentrionales.
Réponses
Les informations reçues des États membres sur les mesures de conservation engagées ont permis de construire un récapitulatif similaire au bilan présenté en figure 3 et les plus importantes mesures répertoriées pour les EEE concernent les habitats dunaires et sclérophylles.
Le projet LIFE Rapid Life (LIFE16 NAT/UK/000582) est présenté de manière assez détaillée dans un encadré. Ayant pour objectif de fournir des mesures de réduction d’impact et de propagation des EEE dans les environnements aquatiques, riverains et côtiers de l’Angleterre, ce programme a produit des outils et des protocoles de gestion des EEE, dont un recours à du biocontrôle concernant la Balsamine de l’Himalaya et la Renouée du Japon. Les éléments rassemblés lors d’un séminaire tenu à Paris en novembre 2018 permettent d’en évaluer les avancées.
Il est indiqué qu’environ 9 % de toutes les mesures de conservation signalées par les États membres concernaient la réduction des impacts d’EEE ou d’espèces indigènes problématiques. En résumé, les habitats concernés sont principalement les habitats côtiers, les dunes, les forêts, les pâturages et les habitats d’eau douce. Les mises en œuvre pratiques incluent l’élimination de plantes exotiques envahissantes telles que la balsamine de l’Himalaya ou la renouée du Japon ou le contrôle et le confinement d’espèces animales envahissantes.
Conclusion et perspectives
Selon ce rapport, malgré les efforts considérables déployés par les États membres, la biodiversité continue donc de décliner et connaît des tendances à la détérioration dans la majeure partie de l’Europe, en raison de pressions continues dues aux changements d’utilisation des terres et des mers, à la surexploitation des ressources (agriculture, pêche et chasse) et des pratiques de gestion non-durables (gestion agricole, forestière).
Dans ce contexte, les EEE sont citées comme facteur aggravant de la situation, comme les modifications des régimes hydrologiques, les pollutions ou les effets du changement climatique. Le rapport signale des évolutions positives mais ces améliorations sont toutefois restées insuffisantes pour atteindre les objectifs fixés pour 2020 de la stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité : aucun des groupes étudiés n’a atteint les objectifs de conservation qui avaient été fixés, avec les habitats et les oiseaux “particulièrement à la traîne” (“particularly far behind“).
La nouvelle stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 visera à combler ces lacunes en mettant l’accent sur la restauration des écosystèmes plutôt que sur la simple prévention de la dégradation et de la perte de biodiversité et en demandant des efforts supplémentaires aux États membres en matière de surveillance, en particulier pour les espèces marines. Le changement climatique a été évoqué comme un défi émergent par les États membres, comme une menace croissante pour les habitats et les espèces, en particulier avec une propagation accrue des EEE.
Le document se conclut par la nécessité d’un renforcement des efforts en faveur de la biodiversité, comme l’adaptation des politiques agricoles et de pêche communes et la garantie de ressources financières et humaines suffisantes pour mettre en place une gouvernance et un cadre politique solides pour la conservation de la nature, atteindre les objectifs de 2030 et soutenir le cadre mondial de la biodiversité post-2020 de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique.
Quelques commentaires sur cet éclairage porté sur les EEE
Tout indispensable qu’il soit en matière d’évaluation de l’efficacité de politiques publiques à cette large échelle, ce document spécifique nous semble aussi pouvoir être perçu comme une illustration de nos difficultés d’appréhension globale de la situation dans laquelle nous nous trouvons.
Dans ce document officiel, les EEE sont logiquement présentées et évaluées comme une des pressions s’exerçant sur les habitats et espèces que les directives européennes ont identifiés comme d’importance et à protéger, conserver ou restaurer, sur une partie du territoire de l’UE. Ce bilan précise que 9 % des actions signalées ont été engagées pour gérer des EEE, ce qui correspondrait donc à plus de 500 actions localisées de conservation de la nature à l’échelle européenne entre 2013 et 2018, ce qui n’est pas négligeable. Il serait d’ailleurs utile de pouvoir accéder à une analyse plus précisément ciblée sur ces actions pour mieux en examiner l’importance relative, les enjeux et l’efficacité.
Cependant, les pressions des EEE s’exercent sur l’ensemble du territoire de l’UE et sur la plupart de nos activités. Le règlement de 2014 marque le début d’une entreprise européenne à long terme pour tenter de les gérer, dont l’évolution de la liste d’espèces préoccupantes pour l’UE n’est qu’un des cadres de fonctionnement. L’efficacité de la mise en application des attendus de cette liste ne pourra être au mieux perçue que dans de nombreuses années.
Les analyses économiques des coûts de la gestion des EEE, qu’elles soient réalisées aux échelles nationales ou supranationales, comme celles réalisées par l’équipe de Franck Courchamp, sont dans presque tous les cas sous-évaluées. Leurs approximations et limites sont en particulier la conséquence des difficultés à réunir toutes les informations utiles disponibles, très largement dispersées dans de multiples structures et institutions sous des formes très variables. Par ailleurs, l’accroissement permanent et très rapide des interventions nécessaires, et donc de leurs coûts globaux, pour réduire les impacts des EEE sur nos activités, incluant nos efforts de protection d’habitats et d’espèces en danger, rend également très difficile l’établissement d’un bilan actualisé fiable.
Ce n’est évidemment pas une raison pour renoncer à ces analyses et bilans, tant ils nous sont nécessaires pour apporter des preuves mesurables, permettant de se faire un peu plus entendre des décideurs politiques et économiques sur les enjeux incommensurables de la gestion de ces espèces. Tous les efforts en cours de l’IPBES pour produire de quoi faire réfléchir doivent être accompagnés !
La lecture de ce document peut également nous questionner sur les enjeux de la poursuite d’efforts aussi importants de conservation d’habitats et d’espèces dans le contexte de bouleversement climatique actuel : jusqu’où faut-il et que pourrons-nous conserver ? En fait, ce changement climatique, considéré comme facteur aggravant des difficultés liées aux EEE, nous questionne plus globalement sur toutes nos possibilités de compréhensions et d’adaptations, voire de modifications de trajectoires que pourraient nous aider à mettre en œuvre les acquis permanents de la recherche.
Et dans les adaptations possibles issues de ces acquis portant en particulier sur le fonctionnement en milieu naturel des communautés non-humaines (ce que nous traduisons de manière anthropocentrique en “services écologiques”) se trouvent peut-être des pistes à explorer telles que le concept de “néo-écosystèmes” qui a commencé à être discuté à partir de 2006 dans le monde de la recherche. Controverse toujours activement en cours entre chercheurs, il s’agirait de biotopes réunissant des combinaisons d’espèces jamais rencontrées auparavant, constituées sous l’influence de divers facteurs anthropiques (dont l’introduction d’espèces exotiques), pouvant fonctionner sans intervention humaine (allons bon !) et pour lesquels un retour à des conditions post-perturbations ne semble plus possible.
Hormis le fait que ce pourrait être seulement une manière de constater, voire d’admirer, l’infinie capacité d’adaptation de la nature et de ses composantes non-humaines (la biodiversité autre que nous), cette controverse peut aussi nous amener à faire évoluer nos représentations et modalités de gestion de la Nature et plus précisément de ces irritantes EEE. Réévaluer les rôles fonctionnels effectivement joués par ces espèces dans les milieux qu’elles colonisent (des anciens et/ou des néo-écosystèmes…) pour nous aider à sortir d’une vision idéaliste et rassurante de la conservation d’une Nature en état de stase. Peut-être une manière de mieux accepter la permanence d’une évolution imposée par ces acteurs non-humains, continue et impossible à arrêter, avec qui établir, quand même, une cohabitation respectueuse.
Rédaction : Alain Dutartre, expert indépendant
Relecture : Madeleine Freudenreich, Comité français de l’UICN
Cover photo: © Daniel Danko, Environment & Me/EEA