Influence du régime hydrologique sur les plantes amphibies : exemple des jussies du Vidourle

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Quelles soient immergées, amphibies ou émergées, dès lors qu’elles se développent dans le lit mineur des cours d’eau ou dans des annexes hydrauliques proches, les plantes aquatiques peuvent être affectées par des événements hydrologiques particuliers. Il peut s’agir des étiages estivaux facilitant leurs développements avec la diminution des vitesses de courant et des profondeurs des eaux et l’élévation des températures. Il peut également s’agir des crues, jouant plutôt un rôle de régulation des peuplements végétaux en place par l’érosion des sédiments, voire même l’arrachage des plantes elles-mêmes, particulièrement lorsque ces crues interviennent dans les périodes où le développement des plantes les transforment de fait en obstacles aux écoulements.

Cette régulation “naturelle” des peuplements végétaux aquatiques reste imprévisible et ne peut donc être intégrée en tant que telle dans les possibilités de gestion des espèces invasives. Elle peut toutefois modifier quelquefois fortement les développements végétaux présents, qu’ils soient indigènes ou exotiques.

Les impacts des crues sur les plantes immergées sont relativement bien connus et dans le guide IBMA récent (Sarat et al., 2015)[1], des commentaires sur le sujet figurent d’ailleurs dans les pages 162 à 164 du premier volume.

En revanche, très peu d’informations sont disponibles sur les autres types de plantes aquatiques, c’est pourquoi la note technique et scientifique produite par le bureau d’études Concept.Cours.d’EAU.SCOP en août 2015 dans le cadre de ses travaux pour le compte de l’EPTB du Vidourle prend tout son intérêt.

Cette note compare les résultats de deux campagnes d’observations réalisées en juin 2014 et juin 2015 dans les mêmes conditions de terrain pour évaluer la répartition et l’abondance de la jussie à petites fleurs (Ludwigia peploides) observée depuis 2010 dans les parties moyenne et aval du cours du Vidourle. Entre ces deux campagnes, un épisode de fortes crues a eu lieu en septembre 2014, avec un débit maximum de 700 m³/s, ce qui correspond pour ce cours d’eau à une période de retour de 5 ans.

La campagne de diagnostic de 2014 avait permis de proposer un premier plan d’actions de gestion des jussies mis en œuvre par l’EPTB et celle de 2015 de faire un nouveau point de la colonisation par les jussies, dans les sites ayant fait l’objet d’interventions localisées de gestion et, plus généralement, sur un tronçon du cours d’eau d’une trentaine de kilomètres, ce qui a permis d’évaluer les effets de la crue de septembre 2014.

Les principaux enseignements que propose cette note à propos de l’évolution de la colonisation par les jussies portent à la fois sur une forte régression de la superficie colonisée, une disparition sur une fraction du linéaire examiné et la création de biotopes apparemment favorables à la germination des graines de l’espèce (bancs de sédiments non végétalisés et berges érodées).

Les auteurs indiquent que la crue a été efficace pour réduire la superficie totale des herbiers dans les secteurs où les jussies étaient abondantes ou très abondantes, et ce sur un linéaire beaucoup plus important que les travaux engagés, mais qu’elle l’a été beaucoup moins sur les secteurs où l’espèce est plutôt implantée en pied de berge ou sur la berge. Ils concluent que les crues du Vidourle semblent insuffisantes pour éliminer la population de jussies mais qu’elles “peuvent assez régulièrement ramener” cette population à des niveaux plus faibles en évacuant une “grande partie des herbiers de pleine eau“.

Ces observations concernant un cours d’eau soumis à un climat méditerranéen ne peuvent évidemment pas être généralisées à d’autres régions de métropole aux conditions climatiques différentes. Mais, hormis les enseignements qu’elles fournissent sur les relations entre hydrologie et développements de jussie dans le Vidourle, enseignements utiles pour une meilleure gestion de l’espèce, dans les remarques qu’elles permettent de faire sur les évolutions observées, elles illustrent très bien l’intérêt de l’application de protocoles de terrain organisés dans un cadre général de mise en œuvre de la gestion des EEE.

En savoir plus :

Alain Dutartre, avril 2016

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