Après 4 années de négociations et dix jours de débats intenses, les représentants des 196 pays membres à la Convention sur la Diversité Biologique (CDB) réunis à Montréal du 7 au 19 décembre, ont adopté le cadre mondial de la biodiversité post-2020 Kunming-Montréal.
Cette COP15 Biodiversité, présidée par la Chine, aura rassemblé plus de 17 000 délégués des États et des représentants de la société civile, des peuples autochtones et communautés locales et du secteur privé.
Ce nouveau cadre mondial inclut quatre objectifs principaux et 23 cibles à atteindre d’ici 2030, telles que la conservation et la gestion efficaces d’au moins 30 % des terres et des océans de la planète et la restauration d’au moins 30 % des écosystèmes terrestres et marins dégradés.
Parmi ces cibles, la cible 6 vise spécifiquement les espèces exotiques envahissantes (EEE) et appelle à :
Éliminer, minimiser, réduire et/ou atténuer les impacts des EEE sur la biodiversité et les services écosystémiques en identifiant et en gérant les voies d’introduction des espèces exotiques, en prévenant l’introduction et l’établissement des espèces prioritaires, en réduisant les taux d’introduction et d’établissement d’autres EEE connues ou potentielles d’au moins 50 % d’ici à 2030, en éradiquant ou en contrôlant les EEE, en particulier dans les sites prioritaires, tels que les îles.
Cible 6 – Cadre Mondial de la biodiversité de Kunming à Montréal, 2022
Ce texte ambitieux est le résultat de nombreuses discussions et négociations qui ont par exemple permis d’inclure cette mention aux îles, qui n’était pas présente dans le projet initial. Une suggestion d’inclure une mention visant à encourager l’utilisation de techniques innovantes n’a en revanche pas été adoptée dans la version finale.
Alors que le précédent cadre mondial (Objectifs d’Aïchi) ne comportait pas de cadre de suivi, cet accord introduit un mécanisme de suivi et d’évaluation qui demande aux Etats de rendre compte d’un large ensemble d’indicateurs principaux et d’autres indicateurs liés aux progrès réalisés pour chacune des cibles. Le tableau ci-dessous présente les différents indicateurs retenus sur les EEE.
En complément, un projet de décision sur les EEE visait à établir l’agenda des prochaines années. Bien que ne figurant pas parmi les décisions officielles de la COP15, les sujets mis en avant portaient sur :
- la création de portails nationaux, régionaux ou internationaux en libre accès ou d’autres sites Web destinés au grand public, afin de renforcer la coopération, la sensibilisation, et la compréhension des menaces que les EEE font peser sur la biodiversité et les écosystèmes ;
- le suivi des effets de lâchers à grande échelle ou de changements de voies d’introduction, de populations exotiques transférées ou élevées en captivité, par exemple de poissons, d’arbres et d’espèces de gibier, sur la diversité génétique des populations autochtones locales ;
- l’analyse prospective, la surveillance et la gestion des maladies infectieuses émergentes affectant la biodiversité et, en particulier, la santé des animaux et des plantes sauvages, causées par des agents pathogènes ou des parasites exotiques et des EEE ;
- les évaluations de l’ampleur des impacts négatifs des agents pathogènes ou des parasites exotiques et des EEE susceptibles de transmettre des agents pathogènes ou des parasites pouvant affecter la biodiversité ;
- l’élaboration d’un système d’étiquetage harmonisé au niveau mondial pour les envois d’organismes vivants et de propagules dangereux pour l’environnement, cohérent avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce et des autres accords internationaux ;
- la collaboration avec l’Organisation mondiale du tourisme, afin d’envisager des efforts conjoints pour inclure le tourisme parmi les secteurs majeurs dans l’introduction d’EEE et la gestion de celles-ci ;
- la collaboration avec la Convention internationale pour la protection des végétaux, en vue de l’élaboration d’orientations opérationnelles harmonisées sur la propreté des conteneurs maritimes et de leurs cargaisons.
Avec la publication de ce nouveau cadre mondial pour la biodiversité, il revient maintenant aux États de rédiger ou d’actualiser leur stratégie nationale pour la biodiversité d’ici la COP 16 (2024) en intégrant des objectifs nationaux alignés sur ces nouveaux objectifs mondiaux. La mise en œuvre des objectifs sera analysée et évaluée à deux reprises lors des COP 17 (2026) et COP 19 (2030).
Dans l’attente de l’adoption du cadre mondial, la France avait déjà publié en mars 2022 le premier volet de la stratégie nationale biodiversité (SNB 3), dont l’amendement post-COP 15 est prévue en 2023.