L’Erismature rousse (Oxyura jamaicensis), petit canard plongeur originaire d’Amérique et introduit en Grande-Bretagne, fait l’objet depuis la fin des années 1990, d’un programme européen de lutte relayé dans les États membres les plus concernés (Grande-Bretagne, France, Belgique, Pays-Bas et Espagne) par des actions de régulation. Originellement piloté par l’ONCFS puis désormais par l’OFB, le plan national de lutte 2015-2025 s’est vu associer un volet financier LIFE depuis octobre 2018 (LIFE Oxyura) pour une durée de 5 années. Constitué d’une équipe dédiée de quatre opérateurs de terrain à compétence nationale basés en Loire-Atlantique et en Mayenne, animé par un coordinateur et un secrétariat, le programme renforce les actions des services territoriaux notamment par une réaction rapide aux signalements, un équipement technique dédié et de nouveaux outils en développement.
Programme européen de lutte
Le 25 février 2020, les cinq pays considérés comme prioritaires ont fait le point sur l’avancement du programme européen lors d’une rencontre animée par le Conseil de l’Europe au titre de la Convention de Berne. Plusieurs indicateurs démontrent les avancées de ce programme. En 2019, pour la première fois depuis 1953, aucune reproduction naturelle n’a été observée au Royaume-Uni. En France, les résultats sont encourageants avec une nette diminution pour la 3ème année consécutive : la population comptait environ 100 oiseaux l’hiver 2018-2019 pour moins de 60 individus en 2019-2020. L’absence d’Erismature rousse en Espagne depuis 2016 est également de bon augure pour la préservation de l’Erismature à tête blanche.
Il est maintenant indispensable de poursuivre les efforts entrepris pour accentuer cette tendance à la baisse des effectifs d’Erismature rousse en Europe et plus particulièrement en France.
Résultats des prospections en France
La technique qui semble la plus adaptée toute l’année est la détection à vue. Tous les étangs favorables à l’accueil de l’espèce sont prospectés de façon régulière par les services départementaux de l’OFB et les quatre agents du projet. A cela s’ajoute une pression d’observations aléatoires des sites par des observateurs confirmés qui peuvent par la suite faire remonter leurs données d’observations d’Erismature rousse.
Présence sur le territoire métropolitain
La présence en Europe de l’Ouest de l’Erismature rousse, résulte d’introductions en milieux naturels en 1953 d’individus échappés d’élevage dont celui du Wildfowl and Wetlands Trust à Slimbrigde (Royaume-Uni).
Sa présence en France est attestée depuis 1974 et les premières preuves de nidification datent de 1988 (Perennou, 1997). Bien que des signalements occasionnels d’individus isolés soient notables sur tout le territoire français, le noyau de la population d’Erismature rousse reste bien localisé en région Pays-de-la-Loire avec comme principaux foyers les départements de la Loire-Atlantique et de la Mayenne.
Il est observé qu’en hiver, la quasi-totalité des individus se regroupe sur le Lac de Grand-Lieu, réserve naturelle située au Sud de Nantes et gérée par la SNPN.
Interventions
Période de reproduction
Durant cette période les oiseaux sont plus actifs et plus visibles ce qui explique la majorité des prélèvements entre Juin et Septembre. Pour minimiser le dérangement des autres espèces de faune sur les sites, les opérateurs de tir sont équipés de carabines 22LR munies de silencieux. Dès lors qu’un oiseau est signalé une première approche consiste à sécuriser le site et à définir des postes de tir. Les tireurs sont ensuite amenés à identifier l’oiseau et à réaliser des tirs sur des distances allant jusqu’à 100 mètres. En cette période, l’utilisation d’une repasse permet d’attirer les oiseaux (notamment les mâles) proche des postes de tir pour une meilleure efficacité de tir.
Période d’hivernage
Les oiseaux étant majoritairement regroupés en hiver sur le Lac de Grand-lieu, il semble cohérent de réaliser des opérations durant cette période. Cependant l’étendue du site et son caractère de Réserve qui abrite des milliers d’oiseaux hivernants autres que l’Erismature rousse ne permettent pas de réaliser des opérations de tir habituelles. L’objectif premier étant de préserver la richesse écologique de ce site, des approches non invasives sont envisagées, comme par exemple, la capture d’individus par l’utilisation de pièges.
La mise en place de postes fixes et l’utilisation de leurres (faux canards en plastique) a toutefois permis la réalisation de tirs efficaces durant l’hiver 2020 avec utilisation d’une carabine 22-250 équipée d’une lunette et d’un silencieux pour des tirs à plus longue distance, tout en évitant le dérangement des oiseaux du site
Résultats
Depuis 2006, la population d’Erismature rousse hivernante en France est en déclin. Les efforts de prélèvements amènent une baisse des effectifs d’Erismature rousse en France, accompagnée d’une réduction du nombre des sites de détections autour du département de la Loire-Atlantique. Ce déclin peut être facilité par une succession de mauvaise années de reproduction d’où l’importance de poursuivre la vigilance et les efforts entrepris.
Rédaction : Valentin Boniface (OFB)
Relecture : Madeleine Freudenreich et Emmanuelle Sarat (Comité français de l’UICN), Alain Dutartre (expert indépendant)
Pour en savoir plus
- Site internet de l’OFB : https://www.ofb.gouv.fr/life-oxyura
- Base d’information du Centre de ressources : Oxuyra jamaicensis
La « repasse » est une technique qui consiste en diffuser des enregistrements de sons d’une espèce afin de provoquer une réponse comportementale ou vocale de l’animal sauvage correspondant. Cette technique peut s’avérer très utile et efficace dans le cadre d’études ou d’inventaires d’espèces souvent difficiles à contacter. Source : LPO Isère