Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Utilisation du métabarcoding pour identifier les ENI transportées par les coques de navires de plaisance en région Occitanie

Dans le cadre du réseau Alien Occitanie, les biosalissures de 33 coques de navires de plaisance répartis sur trois ports d’Occitanie ont été échantillonnées afin d’analyser la présence d’ENI marines par « métabarcoding ». Une trentaine d’espèce non-indigènes ou cryptogènes ont été identifiées.

Le réseau Alien Occitanie

Le réseau Alien Occitanie, le deuxième réseau de ce type à être établi en métropole après celui de Corse, est coordonné par le CPIE Bassin de Thau. Sa création en 2021 a été rendue possible grâce au soutien financier de l’OFB et du plan France Relance. Les objectifs de ce réseau sont de fédérer la communauté des acteurs des ENI marines d’Occitanie, de créer un réseau de sciences participatives, de sensibiliser les gestionnaires des zones portuaires et les plaisanciers aux enjeux des ENI.

Les réseaux ALIEN

Depuis la création du réseau Corse en 2015, quatre réseaux Aliens sont constitués à ce jour le long des littoraux de métropole :

Dans le but de faciliter l’échange sur les objectifs et la gouvernance de chaque réseau, ainsi que de favoriser la mutualisation des outils déployés, une animation nationale des réseaux Aliens en 2024 et 2025 est envisagée par le CPIE Bassin de Thau.

Une étude pilote pour identifier les ENI marines présentes sur les coques des bateaux de plaisance

Alors que la convention BWM traite des questions relatives aux espèces non indigènes (ENI) et aux transports maritimes liés à la gestion des eaux et sédiments de ballast, elle ne couvre pas les préoccupations concernant le transport des ENI par le biais des biosalissures (biofouling) sur les coques des navires de commerce ou de plaisance. Cependant, le programme international Glofouling centralise les projets d’amélioration des connaissances et de gestion (édition de guides de gestion) ainsi que des programmes de formation visant à promouvoir les bonnes pratiques permettant de prévenir les invasions biologiques marines.

Grâce à ce programme et à diverses études à travers le monde, il a été démontré que la navigation de plaisance participe à la dispersion des ENI marines (introductions primaires ou secondaires à une échelle régionale). En France métropolitaine, le parc de bateaux de plaisance est estimé à plus de 320 000 unités réparties sur 462 ports.

C’est dans ce cadre, que le CPIE Bassin de Thau a initié et coordonné une étude pilote en partenariat avec le CNRS pour identifier les ENI marines présentes sur les coques des bateaux de plaisance. L’échantillonnage et les analyses ont été menés sous la direction de Frédérique Viard, Institut des Sciences de l’Évolution de Montpellier (ISE-M).

33 bateaux répartis sur trois ports d’Occitanie (le port marin de plaisance et de commerce de Sète, le port lagunaire de Mèze et le port de plaisance du Grau-du-roi) ont fait l’objet d’un suivi, grâce à des plaisanciers qui ont accepté de prêter leur coque à l’échantillonnage lors d’opération de carénage. Les analyses génétiques ont été réalisées par la méthode dite de « métabarcoding », basée sur l’analyse des ADN obtenus à partir de l’ensemble des organismes grattés sur la coque du navire. Les propriétaires des bateaux ont également pu expliquer leurs habitudes de plaisance et leurs pratiques d’entretien des coques aux échantillonneurs partenaires (Institut marin du Seaquarium et LPO) afin d’aider à expliquer la diversité des espèces retrouvées. En parallèle, un échantillonnage de l’eau des ports a été réalisé pour procéder à son analyse.

Au total, 29 espèces non indigènes ou cryptogènes ont été identifiées dans cette étude dont seulement 14 sont également présentes dans l’eau des ports. En moyenne, les coques abritent 6 ENI ou espèces cryptogènes, avec une forte hétérogénéité par bateau (entre 2 et 11). Parmi les espèces les plus observées : la Bugule brune, Bugula neritina a été retrouvée sur 31 des 33 coques échantillonnées et la Caprelle mauricienne, Caprella scaura sur un tiers d’entre elles.

Consultez la synthèse des résultats : Réseau ALIEN Occitanie. (2023) Les espèces non-indigènes sur les coques des navires de plaisance. Synthèse des résultats. CPIE Bassin de Thau. 4 pages.

Ces résultats régionaux viennent renforcer ceux publiés en 2019 par Ferrario et al. en mer Méditerranée. L’équipe avait échantillonné le biofouling de 367 bateaux de plaisance en 2015 et 2016, issus de 20 ports de France, Italie, Malte, Grèce et Turquie. Au total, 154 espèces avaient été identifiées (natives, cryptogènes et 33 non indigènes). Entre 11 % et 42,3 % du nombre total d’espèces présentes sur la coque était constitué d’ENI.  Les bateaux abritaient en moyenne 2,5 espèces d’ENI, avec un maximum de 10 espèces d’ENI observées sur une coque du port de Licata en Sicile. Seuls 12 % des coques n’abritaient aucune ENI. Parmi les principales espèces d’ENI, ont été trouvés le polychète Hydroides elegans, le bryozoaire Amathia verticillata et l’amphipode Caprella scaura.

Ce type de protocole d’échantillonnage pourrait devenir un atout supplémentaire pour la surveillance des ENI marines tout en mobilisant les filières de la plaisance et les plaisanciers eux-mêmes sur ce sujet.

Par ailleurs, le réseau  Aliens Occitanie déploie déjà en parallèle d’autres actions de sensibilisation et de surveillance sur une période de trois ans (2020-2023) :

  • sensibilisation aux enjeux ENI marines auprès des gestionnaires des ports labellisés « Port propre actif en biodiversité » d’Occitanie et auprès des ambassadeurs de la campagne Écogestes (campagne de communication engageante visant à inciter les plaisanciers à modifier leurs pratiques afin de réduire leurs impacts sur la biodiversité marine : https://ecogestes-mediterranee.fr/ );
  • renforcement du réseau de science participative sur le volet ENI avec les fédérations et clubs de plongée (livret de reconnaissance des ENI pour que les pratiquants puissent signaler leurs observations dans les carnets de plongée, outils BioObs et Cromis) ou encore par des opérations de sensibilisation du grand public (invité à renseigner leurs observations sur le site de BioLits nouveaux arrivants : https://www.biolit.fr/les-nouveaux-arrivants/ ).
  • sensibilisation auprès des pêcheurs de plaisance sur le crabe bleu (Callinectes sapidus), également invité à faire remonter leurs observations.

 

Rédaction : Coraline Jabouin, OFB

Relecture : Madeleine Freudenreich, Comité français de l’UICN

 

Pour en savoir plus :

  • Réseau ALIEN Occitanie. (2023) Les espèces non-indigènes sur les coques des navires de plaisance. Synthèse des résultats. CPIE Bassin de Thau. 4 pages.
  • Ferrario J., Ulman A., Occhipinti Ambrogi A., Bandi A., Bogi C., Princisgh E., Martinez-Laiz E., Merlo G., Scribano G., Marchini A. (2019). High occurrence of non-indigenous species on recreational boat hulls in the Mediterranean sea. Biol. Mar. Mediterr. 26(1) : 239-242